« L’amour, c’est le sujet le plus important, c’est le sujet des sujets », écrivait François Truffaut au moment de la sortie de La Femme d’à côté, dont nous fêtons les 40 ans en septembre 2021. C’est pourquoi, puisque tout le monde dit « I Love You », nous voulions parler d’amour au moment de rouvrir nos portes au public.
Voici venue, on l’espère, une saison de films du monde entier : les cinéastes qui montrent des amours indécises (Michel Piccoli, Woody Allen, Bo Widerberg, Paul Vecchiali, Anne Fontaine, José Luis Guerín, Patricia Mazuy), ou labyrinthe d’amours malades (François Truffaut, Claire Denis, David Lynch, Jean Renoir, William Wyler). Il y a aussi toutes ces amours imaginaires dont on ne sait que faire (Manoel de Oliveira, Mai Zetterling, Valérie Donzelli) – et des films où l’amour sert de nom à un autre combat (Kijû Yoshida, Lina Wertmüller). La dimension documentaire n’est pas exclue de ce programme : Tamara Stepanyan s’intéresse aux attentes des femmes en Arménie, et nous découvrons aussi, avec joie, l’art de l’adresse amoureuse avec la splendide Lettre d’un cinéaste à sa fille, essai poétique hors-norme d’Éric Pauwels.
Le programme entier pourrait se décliner de la sorte. Mais revenons sur la première séance, toujours symbolique, car elle permet à travers ce prisme de l’amour, de rappeler les multiples missions de la Cinémathèque de Grenoble.
D’une part, sa volonté d’accompagner le court métrage contemporain, avec la projection de Zoé la boxeuse de Karim Dridi, un bijou de concision sur le crime passionnel, film primé par notre Festival du film court en plein air à l’été 1992. D’autre part, la Cinémathèque doit témoigner de l’insoupçonnable richesse des collections dont elle est la garante : c’est pourquoi projeter le film doux-amer de Jean-Baptiste Rossi (aka Sébastien Japrisot), produit par Pierre Braunberger, permet de valoriser les dons et dépôts qui lui ont été confiés depuis des années. Le premier court métrage de celui qui allait devenir un écrivain reconnu fut pour nous une immense surprise de découverte : le titre, en outre, est tellement beau qu’il a guidé l’ensemble de la programmation. Et enfin, nous voulons revendiquer l’appartenance naturelle de notre institution aux réseaux d’archives de films qui poursuivent un travail de conservation comme celui auquel nous nous attelons. La Cinémathèque française nous per- met de découvrir la splendide version restaurée de L’Âge d’or de Luis Buñuel, merveille absolue de cinéma ayant pour sujet cela : l’amour fou, envers et contre tout.
Gabriela Trujillo, directrice de la Cinémathèque
Val Abraham de Manoel de Oliveira